Renforcement des échanges bilatéraux, approvisionnement en gaz naturel… En visite d’État à Maurice du 30 janvier au 2 février 2019, le président mozambicain Filipe Jacinto Nyusi a répondu en exclusivité à nos questions sur les nouvelles perspectives de rapprochement entre les deux pays.
L’Eco austral : Comment développer les relations économiques entre Maurice et votre pays ?
Filipe Jacinto Nyusi : Notre visite à Maurice a été très productive. Nous avons rempli trois objectifs majeurs à savoir : assister à la commémoration du 184e anniversaire de l’abolition de l’esclavage (60 % des captifs déportés à Maurice viendraient du Mozambique, NDLR), renforcer les relations amicales et fraternelles entre nos deux États, et assurer une mission de diplomatie économique qui a abouti à un forum d’affaires. Nous croyons que le secteur privé est l’instrument stratégique des relations économiques entre nos deux États. D’ailleurs, depuis que Maurice a rejoint en 1995 la SADC (Communauté de développement d’Afrique australe), nos relations se sont renforcées. Aujourd’hui Port-Louis fait partie des dix premiers investisseurs au Mozambique. Lors de la rencontre avec le secteur privé mauricien, nous avons présenté le potentiel mozambicain ainsi que les mesures visant à faciliter nos échanges. Par exemple, mon gouvernement met en place une législation harmonisée afin que les hommes d’affaires puissent trouver les mêmes facilités ici et au Mozambique, cela pour promouvoir davantage les déplacements des deux côtés. Nous réfléchissons aussi à un allégement des procédures d’obtention de visa pour se rendre au Mozambique et avons commencé à harmoniser notre fiscalité pour éviter l’invasion fiscale.
Quels sont les futurs axes de coopération entre les deux États ?
Nos discussions ont porté sur la coopération économique dans les domaines de l’agriculture, de la gestion touristique et de l’énergie, en particulier dans les secteurs minier et gazier.
On a découvert d’énormes quantités de gaz au Mozambique. Nous confirmons que le pays sera un producteur majeur de gaz naturel à partir de 2022-2023. Des multinationales américaines, italiennes et d’autres pays sont maintenant en partenariat avec notre société nationale d’hydrocarbures. Maurice souhaite également obtenir notre gaz naturel, nous allons donc signer un mémorandum d’accord dans les deux ou trois prochains mois.
Nous possédons également des terres rares ainsi que des ressources potentielles intéressantes, en particulier dans l’agriculture, pour développer nos pays et créer des relations fraternelles entre nos deux peuples. C’est pourquoi nous devons passer à l’action ! D’ailleurs, nous avons invité le Premier ministre mauricien à se rendre au Mozambique au moment le plus opportun.
Quelle est votre stratégie pour encourager la création d’emplois et l’esprit d’entreprise dans votre pays ?
Maurice est pour nous un exemple. Vous n’êtes « que » 1,3 million d’habitants – nous sommes plus de 29 millions – et votre niveau d’alphabétisation est très élevé. Le Premier ministre mauricien m’indiquait qu’il était de 90 % (contre un peu plus de 40 % au Mozambique, selon l’UNESCO, NDLR). L’agriculture représente 21 % de notre PIB et près de 80 % des emplois. Il nous reste donc beaucoup à faire en matière de mécanisation dans nos cultures de noix de cajou, de coton et de macadamia. Cela nécessite des investissements massifs pour générer plus de revenus. Aussi, la première chose à faire est d’éduquer la population avec des filières générales mais aussi professionnelles et techniques pour produire plus et mieux. Nous avons la même problématique concernant nos ressources minérales comme le charbon, l’or, la bauxite ou le marbre. Elles doivent être transformées et valorisées au maximum au Mozambique. Ma visite à Maurice a aussi pour objectif d’obtenir des financements pour industrialiser mon pays.
Source – L’Eco Austral